17 Juin, 2022 au 26 Février, 2023
PRÉJUGÉS, SILENCES ET PROTESTATIONS
Les réponses des Églises chrétiennes face à l’antisémitisme de l’entre-deux-guerres, puis face à la Shoah, ne peuvent se comprendre sans prendre en compte la longue histoire des relations entre judaïsme et christianisme.
Des siècles d’enseignement chrétien stigmatisent les Juifs tout en préservant leur survie comme « peuple témoin ». La longue tradition d’hostilité des Églises envers les Juifs explique la rareté des condamnations chrétiennes de l’antisémitisme, ainsi que l’acceptation des lois antijuives des régimes nazi, fascistes et ultranationalistes.
La plupart des dirigeants chrétiens ne comprennent pas que ces discriminations signifient la « mort sociale » des Juifs, une exclusion de la société qui constitue la première étape avant leur persécution physique.
ENTRAIDE, RÉSISTANCE ET DIPLOMATIE
Avec le tournant dramatique de l’année 1942, les appels chrétiens à « rompre solennellement le silence » se multiplient, à l’image des Cahiers du Témoignage chrétien.
La parole, l’indignation, la résistance spirituelle deviennent ainsi cruciales dans la mobilisation des chrétiens et chrétiennes et peuvent se traduire sur le terrain en actions d’entraide et de sauvetage. Face à l’assassinat des Juifs d’Europe, l’attitude des Églises et des fidèles est cependant fortement contrastée, sur un spectre allant de la
collaboration aux déportations d’un côté à la résistance active et à l’opposition aux persécutions de l’autre. Entre les deux, une large zone grise se compose de réponses plus ambivalentes et changeantes, comme les démarches diplomatiques plus réservées du Vatican.
APRÈS LA SHOAH : MÉMOIRES CONTRASTÉES
La question de l’attitude des Églises face à la Shoah ne s’arrête donc pas à la libération des camps. Le procès de Nuremberg révélant toute l’étendue du projet nazi de déshumanisation et d’extermination des Juifs d’Europe n’altère pas complètement la permanence de préjugés antijuifs au sein des hiérarchies chrétiennes.
En témoignent trois affaires débattues dans l’après-guerre : la protection ecclésiastique des fugitifs nazis et collaborateurs et les limites de la dénazification des Églises ; les interprétations théologiques de la Shoah ; la restitution des enfants juifs cachés.
Trois questions épineuses reflétant « un passé qui ne passe pas » et une difficulté pour les Églises à confronter leurs responsabilités historiques et à repenser leur rapport au judaïsme.